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David Goodis, le capitaine Ballard et Jean Landis

En 1950 paraît le cinquième roman de David Goodis, Of missing persons. Il est traduit dès l’année suivante par Jean Rosenthal et édité en Suisse dans la collection Détective-club, sous le titre La police est accusée. Ces deux titres résument bien l’intrigue du roman, un roman qui n’est autre que l’adaptation d’un traitement que le scénariste avait commis lors de sa période hollywoodienne. Ce traitement n’ayant pas abouti, à l’image de la plupart de ses travaux pour le cinéma, l’auteur le reprend et marque ainsi son retour à Philadelphie, sa ville, après son échec hollywoodien.

Le capitaine Jack Ballard boucle une affaire. En tant que chef du service des personnes disparus, il achève son enquête sur John Nichols par la présentation de son cadavre à sa veuve. Pas réellement une réussite. Cette dernière lui reproche la lenteur de ses services et, du même coup, la mort de La police est accusée (Ditis, 1950)son mari. Il parvient à la convaincre de ne pas mettre fin à ses jours en se jetant de la corniche juste de l’autre côté de la fenêtre de son bureau, mais l’opinion a désormais l’attention tournée vers son service.

Et l’opinion prend deux formes. La première d’entre elles est la plus familière à nos yeux, il s’agit d’un journal à scandale, le Graphic, dirigé par Jorgenson. Le journaliste lui rend visite en lui demandant des explications sur l’affaire Nichols et sur les affirmations de la veuve ; d’après elle, son mari est toujours en vie… revirement d’opinion auquel elle ne peut apporter de preuve. La deuxième forme est celle des services de l’attorney general ; l’un de leurs employés, Matthew Carvin, est envoyé pour mener une enquête sur le service et les plaintes dont il fait l’objet de la part des usagers.

Jack Ballard aime son métier au point de ne pas être aussi disponible pour sa femme qu’il le souhaiterait, au point de ne pas compter ses heures et de compromettre sa santé. Les affaires se multiplient, la tension est sans cesse présente et Ballard tente de surnager… Mais il aime son métier et refuse même les propositions d’un ami pour rejoindre sa compagnie d’assurance, pour un poste aux émoluments autrement plus intéressants que ceux qu’il perçoit. Sa motivation semble inébranlable. Mais lorsque Carvin débarque, avec son regard extérieur, ses grands principes, son assurance, et précédé par les dégâts qu’il a fait dans les autres services de la police, s’en est trop pour Ballard. Plutôt que de subir la charge permanente de Carvin et l’issue inévitable de son passage dans ses bureaux, Ballard préfère démissionner et accepter enfin la proposition dont sa femme rêve…

Seulement, un rebondissement dans l’affaire Nichols le force à rester et à reprendre l’enquête. Myra Nichols a été assassinée et la principale suspecte est Jean Landis, l’ancienne infirmière de la victime, celle dont John Nichols était tombé amoureux… Les services de Ballard risquent de ne pas se relever d’un tel rebondissement et Ballard est convaincu de l’innocence de l’infirmière.

Nous assistons aux efforts de Ballard pour mener son enquête, pris entre deux feux, ceux de la presse et de l’envoyé des services du district attorney. Nous assistons à ses efforts et notre propre opinion vacille. N’a-t-on pas raison de le montrer du doigt, de douter de ses méthodes ? Mais il avance, sur la corde raide, prêt à sacrifier beaucoup…

Et on y trouve l’une des figures récurrentes de l’écrivain, l’un de ses thèmes de prédilection, un homme tentant de sauver une femme. Ici, il s’agit de Jack Ballard et de Jean Landis ; dans La garce, il y avait Barry et Evelyn ; dans Retour à la vie, c’était Herbert et Dorothy. Un homme tentant de sauver une femme, de se porter à son secours, pour se sauver lui-même… Cette figure s’inversant dans Cauchemar avec Irene et Vincent et dans Nightfall avec Martha et James…

Malgré tout, c’est un roman mineur de Goodis, un roman différent. Il nous offre une ode à la police, à l’abnégation de ceux qui mènent les enquêtes, qui croit dans un service publique. Un roman singulier qui s’attarde sur un homme, un policier qui plonge, s’enfonce, tente de remonter à la surface. Un homme qui en affronte d’autres tentant de lui maintenir la tête sous l’eau. C’est un roman mineur de Goodis car tout à coup la description psychologique perd en importance, le suspens prend le pas sur les personnages en semblant s’inviter de manière peut-être un peu forcée, détachée de l’intrigue. C’est malgré tout un roman que j’ai trouvé intéressant, un roman comme j’ai eu l’impression d’en avoir peu lu… Un roman qui flirte avec le roman noir, qui en est un par instant.

L’année suivant la publication de La police est accusée paraît un nouveau roman de Goodis, Cassidy’s Girl.

3 réflexions sur “David Goodis, le capitaine Ballard et Jean Landis

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